Bilan culturel #3 - Normal People, Matisse & Nouveau Roman

mardi 7 juillet 2020
Tom Shannon, Drop, (2009), Château La Coste, Le-Puy-Ste-Réparade, 2019 


  Cette semaine, je reviens, dans un article non exhaustif, sur des éléments que j’ai pu découvrir ces dernières semaines (voire ces derniers mois). Je présente ici mon avis pour te donner, je l’espère, envie de t’intéresser à de nouvelles œuvres que tu ne connaissais peut-être pas encore ! Bonne lecture !  
  

Séries  

Mrs. America de Dahvi WALLER, 2020  
  
     Si tu t’intéresses au féminisme, de près ou de loin, je te conseille cette série qui, à travers des figures de proue de la deuxième vague féministe aux États-Unis dans les années 1970, retrace l’histoire de ce mouvement et de la défense des droits des femmes dans une société patriarcale et conservatrice.  

    L’intrigue de cette série composée d’une saison unique se concentre sur deux groupes de femmes qui se battent pour et contre la ratification de l’ERA c’est-à-dire de l’Equal Rights Amendment. D’un côté, les féministes, autour de Gloria Steinem et Betty Friedan, tentent de défendre l’égalité des droits entre les femmes et les hommes. De l’autre, des femmes au foyer conservatrices, menées par Phyllis Schlafly, s’opposent à la ratification de cet amendement par crainte de perdre leurs privilèges. Cette série, inspirée d’une histoire vraie, est très intéressante car elle permet de mieux comprendre le contexte de la deuxième vague féministe étasunienne et le poids d’un modèle patriarcal, jusque dans la façon de penser de certaines femmes. 

  On suit différentes femmes aux passés singuliers et aux opinions divergentes. J’ai particulièrement été touchée par le personnage de Alice, interprété par Sarah Paulson. Je trouve que c’est le personnage qui évolue le plus et qui donne une autre dimension à la série en dépassant la narration linéaire d’événements historiques. Au fur et à mesure des épisodes, cette mère au foyer s’émancipe jusqu’à rompre avec les oppositions défendues par le mouvement conservateur (notamment dans les deux derniers épisodes qui mettent en scène sa « révélation », sa prise de conscience).   

    Quoiqu’il soit un peu difficile d’entrer dans les premiers épisodes, cette série vaut vraiment le coup de s’accrocher et de suivre l’évolution personnelle des femmes représentées ainsi que celle de la lutte pour l’égalité femme-homme. Si jamais cela t’a intrigué, Julittérature parle également de cette série dans son bilan culturel du mois d’avril. Cela te permettra d’en apprendre davantage avant de te lancer dans son visionnage ! 





Normal People de Sally ROONEY, Alice BIRCH et Mark O’ROWE, 2020 

(adaptation du roman éponyme de Sally ROONEY) 
  

     Mon coup de cœur ! J’ai dû regarder cette série en moins de deux jours tellement elle m’a plu ! Cette adaptation met en scène Marianne et Connell, alors lycéens au début de la série, et suit l’évolution de leur relation amoureuse complexe jusqu’à leurs années universitaires. Normal People est une série touchante, non seulement parce qu’elle a pour intrigue principale une histoire sentimentale marquée par la passion et l’authenticité, mais aussi parce qu’elle se caractérise par une puissance cinématographique assez remarquable. Son esthétique visuelle est renforcée par des choix pointilleux qui composent une bande originale très juste, où chaque morceau s’inscrit dans un contexte adéquat et transmet une émotion particulière. 

     J’ai adoré l’authenticité de cette histoire, autant du côté de la personnalité des personnages et de leurs relations que du côté de la narration en général. Comme cela a été souligné de nombreuses fois à propos du roman original, cette histoire est transituationnelle et transgénérationnelle. Elle est donc intemporelle même si elle s’inscrit dans notre époque contemporaine et permet à chacun de vivre et de ressentir les émotions dépeintes. Je n’ai maintenant qu’une hâte, c’est de pouvoir lire le livre ! Vraiment, à voir ! 




Films 
  

Green Book : Sur les routes du sud (Green Book) de Peter FARELLY, 2019 
  

    Je pense que, si tu ne l’as pas encore déjà vu, tu as déjà entendu parler de ce film. Dans les années 1960, aux États-Unis, le Dr Don Shirley, un pianiste prodige noir, doit faire appel aux services de Tony Lip, un videur blanc d’origine italienne, pour assurer sa sécurité lors de sa tournée dans les États du sud du pays, des États ségrégationnistes.   

    Cette histoire, inspirée de faits réels, est très touchante et participe de la sensibilisation à la question des droits humains, trop souvent menacés par des opinions (voire des politiques) raciales. Entre drame et comédie, ce film est à la fois prenant et divertissant. Les touches d’humour légères, souvent apportées par les propos ou les comportements des personnages, ne parviennent toutefois pas à effacer la réalité de la ségrégation et des inégalités raciales. Grâce à des scènes qui reflètent une réalité pas si lointaine, Green Book interroge notre histoire, nos comportements et notre manière d’envisager l’avenir, ensemble plutôt que divisés.  





À la dérive (Adrift) de Baltasar KORMÁKUR, 2018 
  

     Je reconnais que j'avais des préjugés sur ce film dont je ne connaissais que vaguement la trame avant de me lancer dans son visionnage. Je savais seulement que cela évoquait la dérive d'un couple perdu dans l'océan - grosse connaissance du synopsis en effet -. Ne sachant que faire, j'ai décidé - sans grandes attentes - de laisser sa chance à cette œuvre de Baltasar Kormákur. Et là, surprise ! : histoire vraie, belle trame narrative, personnages émouvants avec une épaisseur psychologique, relation amoureuse touchante, contrepoint intéressant entre l'avant et l'après « dérive » (enfin quand elle a commencé parce que le bateau coulait). C’est un bon film que je recommande !  




Documentaire 

 Matisse voyageur - En quête de lumière de Raphaël MILLET, 2019, sur ARTE  
 
 
     Ce documentaire est juste magnifique et incroyable. Il retrace le parcours artistique de Henri Matisse dans sa quête de lumière et de couleur. Quoique le peintre français soit principalement connu pour ses œuvres tardives reconnaissables par des motifs coralliens et des couleurs acidulées, son œuvre est bien plus riche et diverse et ne s’arrête pas seulement aux collages qu’il a réalisés à la fin de sa carrière. Ce film permet donc de mieux connaître le peintre, son œuvre, son regard et sa manière de travailler largement inspirée de ces nombreux voyages dans le sud de la France et à l’étranger. À voir ! (disponible jusqu’au 29 juillet 2020) 


Livres 
  

The Defining Decade : Why Your Twenties Matter de Meg JAY, 2013 
  

     Comme dernièrement j’étais noyée dans l’incertitude à laquelle la vie me confrontait, je me suis dit « pourquoi pas lire ce livre ! ». The Defining Decade - ou « La décennie décisive » si on veut - s’intéresse à la vingtaine et au nouveau sens que cette décennie peut prendre pour nous. Autrefois, la vingtaine était, peut-être pas toute tracée, mais presque : on faisait des études, souvent courtes, on se mariait et on avait des enfants. Cela peut paraître caricatural mais en gros c’est ça. Aujourd’hui, la vingtaine, c’est la décennie de l’incertitude et de l’indétermination, un peu comme une période transitoire de dix ans avant d’entrer dans la « vraie vie ». 

    Cependant, la thèse de l’autrice est justement que, contrairement à cette idée d’une période d’insouciance et de légèreté, les années précédant la trentaine sont décisives pour notre vie future. Sur le papier, cela promet d’être un ouvrage intéressant et enrichissant qui permettrait de reconsidérer ces années un peu floues de la vingtaine. Dans les faits, j’ai été très déçue par le contenu du livre et l’approche de l’autrice. 

    Il faut savoir que Meg Jay est psychologue et qu’au cours de sa carrière elle a travaillé de nombreuses fois avec des patients âgés d’une vingtaine d’années. Elle se présente alors comme une experte de la question capable de donner des règles de vie transposables à toutes les situations, pour tous les jeunes de la vingtaine. Personnellement, j’ai trouvé que son livre manquait de consistance et de densité. L’autrice tente de donner une apparence faussement scientifique à son propos en accumulant les témoignages, les descriptions de cas de jeunes adultes un peu perdus et les références à des articles plus ou moins denses sur la question. Cette abondance donne alors l’impression d’une absence de fond.  

    Même si l'autrice a connu beaucoup de patients, ces quelques cas peuvent difficilement être représentatifs d'une génération toute entière. De plus, il faut bien prendre en considération que ce livre s’appuie sur le regard qu'une quarantenaire porte sur des personnes de la vingtaine. Or, avoir la vingtaine aujourd'hui n'a plus du tout le même sens et la même portée que lorsqu’elle avait vingt ans. Elle n’apporte donc qu’un regard extérieur biaisé par un modèle conservateur persistant de « réussite » qui correspond à avoir un emploi stable avant trente ans, un conjoint auquel on est engagé et ce, dans la perspective d’acquérir un bien et de « fonder une famille ». Je n’ai donc pas appris grand-chose, à l’exception peut-être que la vingtaine reste toujours aussi floue 


Tropismes de Nathalie SARRAUTE, 1957  

  
     J’ai lu (et relu) cette œuvre car elle était cette année au programme de ma prépa. Le livre s’organise sous forme de petits tableaux qui présentent ce que l’autrice appelle des « tropismes » et qu’elle définit comme « ces mouvements, légers remous, ondulations rapides et hors de notre volonté, anodins de l’extérieur, presque insaisissables, sont ressentis comme un malaise, un malaise difficilement cernable. » (Rolande CausseConversations avec Nathalie Sarraute). L’écriture n’est pas difficile d’accès et se concentre particulièrement sur le choix des mots et des sons afin de créer un rythme presque performatif qui fait ressentir au lecteur ce que sont les tropismes. Ce n’est pas comme un roman où l’on suit la narration avec des personnages et des événements. Ce sont de « minuscules tranches de vie » que l’autrice tente de saisir et de retranscrire par la littérature.   

     Honnêtement, je trouve que c'est du génie. La justesse de l’écriture qui procure des sensations chez le lecteur rejoint une approche phénoménologique, une perspective de l’expérience vécu qui naît à travers la langue et l'écriture.  
  

Musique  
  

     Ces dernières semaines, je n’ai pas écouté un seul artiste en particulier. Les morceaux que j’ai compilés dans la playlist ci-dessous sont variés et reflètent les différentes humeurs que j’ai pu connaître depuis le début du confinement. Les mois passés ont été pour le moins éprouvants et parfois, même la musique ne me permettait pas d’aller mieux mentalement. Toutefois, voici quelques morceaux vers lesquels je me suis souvent tournés ainsi qu’une playlist que j’ai composée lorsque je ressens le besoin d’arrêter de penser (même si cela n’est pas si facile). J’espère que cela te plaira !  



     
     Quoique je n’ai pas fait de grandes découvertes musicales pendant des semaines puisque je n’étais pas disposée à la recherche de nouveauté si je puis dire, je suis très récemment tombée par hasard sur deux artistes qui m’ont littéralement conquise ! L’algorithme YouTube ne fait pas si mal son travail apparemment. 🙃 

    La première, c’est Tanerélie. Je ne connaissais pas du tout cette artiste américaine mais comment te dire : la voix, le rythme, le visuel de cette vidéo… Ce mélange sensuel de RnB et de soul est tout simplement envoûtant !  
  




     La seconde, c’est Lianne La Havas. Je connaissais déjà quelques-uns de ces morceaux mais je l’ai vraiment redécouverte grâce à son interprétation de son titre Bittersweet pour COLORS x STUDIOS. Je pense que seule l’écoute de cette voix permettra de retranscrire l’émotion qu’elle procure. J’en ai les poils qui s’hérissent ! Enjoy. 😌  
  





YouTube 
  
Brittany Bathgate (anglophone) : Si tu aimes les vlogs chill à la maison, calmes et esthétiques, je te conseille ceux de Brittany Bathgate. Ces dernières semaines, j’ai rattrapé toutes les vidéos qu’elle avait postées mais que je n’avais pas eu le temps de voir. Maintenant, c’est mon petit rendez-vous détente du dimanche soir et j’adore me poser pendant une heure devant ses vlogs et ses réflexions. Elle parle mode, littérature, vin, voyages et actualités. Vraiment, je l’adore. ❤️
  

Ectomorphe (francophone parfois sous-titré anglais si jamais tu veux t’entrainer) : Louisa est une jeune illustratrice qui vit à Toulouse. Sur sa chaîne, elle partage son quotidien d’illustratrice à travers des studios vlogs et des vidéos autour de thématiques directement liées comme ses débuts en tant que freelance. Entre dessin, peinture, création de contenu, gestion d’entreprise et réflexions, sa chaîne est très complète et te plaira sûrement. Et puis, sa bonne humeur est tellement communicative !  


Wear I Live (anglophone) : Cette chaîne, je ne la présente plus. Je crois que je mentionne les vidéos de Jenny dans chaque bilan culturel mais j’apprécie tellement son contenu, sa façon de voir les choses et son ouverture d’esprit que je suis obligée de la partager sur ce blog !  
  

Cari Cakes (anglophone) : Si tu as envie de découvrir la ville de Séoul, ses petits cafés, ses parcs, ses expositions et ses forêts environnantes, tu es au bon endroit. Cette Américaine expatriée en Corée du Sud depuis quelques années partage son quotidien dans des vlogs esthétiques tellement satisfaisants à regarder. Sérieux, à travers son regard, même une poubelle ou un tas de débris serait beau à voir !  
  

Kelly Stamps (anglophone) : La chaîne de Kelly Stamps est le temple de l’humour, de l’autodérision et du WTF. Cette Californienne qui habite à New York partage du contenu léger, parfois absurde mais qui fait du bien pour se changer les idées.  



Comptes Instagram 


@jonathanbertin : Je pense que le travail de Jonathan Bertin est un des incontournables dans le game des comptes de photographies français. Il poste principalement des photographies de voyage avec une approche qui change du simple cliché touristique évidemment. Avec le confinement, il a également travaillé des autoportraits, toujours aussi réussis !  

PS : il a aussi une chaîne YouTube sur laquelle il partage ses conseils autour de la photo et ses expériences de voyage en tant que photographe professionnel. 😉   

@jmurillo.photo : Jonathan Murillooui, encore un Jonathan décidément - est un photographe urbain vivant actuellement à Bilbao en Espagne. Il poste régulièrement des photos que l’on pourrait appeler « extraits urbains ». Je te conseille également de consulter son portfolio sur son site pour avoir un aperçu plus complet de son travail. Vraiment, j’aime beaucoup son approche photographique de l’ombre et de la lumière.  

@anna_maghradze : Sur ce compte tu peux retrouver le travail de collage photographique de Anna Maghradze. Ces photos sont très poétiques, parfois proches du surréalisme, et toujours sublimes !  

@lenkexplores : Ici, tu retrouveras des autoportraits photographiques artistiques à la fois magnifiques et perturbants puisque certaines séries mettent en scène des éléments inhabituels comme du faux sang - mais n’es pas peur, comme je l’ai dit, c’est artistique - ! 


 
C’est tout pour ce bilan culturel ! J’espère qu’il t’aura plu et qu’il t’aura permis, soit de découvrir de nouvelles choses, soit d’élargir ta façon de les appréhender grâce à un point de vue différent. Comme toujours, n’hésites pas à partager ton avis en commentaire, je serais ravie de le connaître ! 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

N'hésites pas à laissez un commentaire pour partager ton avis et tes inspirations culturelles ! 😊